Témoignage d'un enseignant-chercheur présent tout au long de la journée.
Informations sur les incidents au CLSH Nancy ce 4 mai 2018 ou story-telling présidentiel et
préfectoral... la version d'un universitaire présent.
Désolé si c'est un peu long...
Bonjour tout le monde,
Hier donc se tenait une assemblée générale sous le sapin à l'appel des
étudiants mobilisés, une cinquantaine de personnes avec autour presque
plus de monde en comptant les personnels de l'administration centrale et
une quinzaine de vigiles, vigiles semble-t-il un peu perdus par cette
ambiance de douce radicalité et par des consignes plus que floues... Des
travailleurs en insécurité professionnelle de plus sur le campus.
En plus des vigiles, nous avons découvert que deux plaques de bois
étaient vissées sur les portes de la salle 28.... et sur l'entrée des
locaux syndicaux.
Après avoir vidé le local dit 'libertaire' à la suite de la première
intervention policière (qui a ordonné ça et pourquoi au fait ?), voilà
que l'accès aux bureaux des associations et syndicats étudiants est
barricadée... par qui ? Pourquoi ? Quel est le message d'apaisement
symbolique proposé ? De quel droit barricade-t-on des syndicats ?
A la fin de l'assemblée générale, qui a voté la réouverture des locaux
barricadés, la salle des profs a été ponctuellement occupée, sans
réouverture des salles, les occupants sont sortis en vidant une partie
du mobilier, en clin d'oeil potache au nettoyage par le vide du local
libertaire.
Attention violences extrémistes
La présence de vis à têtes rares ayant stoppé les tentatives d'un
démontage propre, un portemanteau a, il est vrai, été emprunté pour
casser les plaques de bois vissées sur les deux portes barricadées. (une
troisième plaque, fermant le local libertaire ayant été démontée plus
proprement ensuite). Les 'vraies portes' ont subi ensuite une forte
poussée pour être ouvertes.
Comme dit le slogan, nos pensées vont aux familles des plaques et des
serrures, mais voilà la totalité des violences du comité de
mobilisation, désolé pour le croustillant...
Fin des violences extrémistes
A noter que les vigiles regardaient cela de loin prêts à intervenir si
violences à personnes, semblant missionnés pour éviter une occupation
des amphis en examen, et que des membres de l'administration
filmaient... Nous y reviendrons...
Profitant de la présence d'étudiants sur le campus, une seconde ag s'est
improvisée sur les marches devant les amphis 'A', proposant un échange
avec les étudiants occupés... à leurs examens, il est vrai.
La masse des étudiants devant les amphis se dirigeant vers les amphis
'K', le comité de mobilisation a poursuivi son 'échange' en
accompagnant, le tout suivi par les vigiles, le flot vers les amphis K,
pour finalement en bloquer l'accès.
Après un -long- face à face détendu (une très légère altercation, entre
étudiants, à l'arrivée de la police, vite calmée)... la police, et
quelques bacs, sont invités à pénétrer sur le campus (par qui, aucune
réponse ?), et à en prendre le contrôle.
Le comité d'action laisse les entrées des amphis à la maréchaussée et
s'assoit (imprudemment) sur le parking et la pelouse, jouant de chants
et d'appels au mégaphone.
Violences légitimes
C'est ensuite la police qui appelle les étudiants à entrer dans les
amphis, contrôle les cartes d'étudiants (et rient des incompréhensibles
acronymes des diplômes, malgré les progrès d'information sur les
diplômes permis par la loi ORE...), qui autorise le passage des
enseignants-chercheurs et personnels pour la tenue des examens. Nos
collègues ont donc accepté de se prêter au contrôle policier et de se
faufiler entre deux haies de policiers en armes pour tenir un examen...
dans des conditions idéales donc, au delà même des étudiants ayant
renoncé à composer devant ces évènements... Il va exister des collègues
pour corriger ces épreuves ?
A noter la présence de collègues, enseignants et non enseignants,
regardant de loin la prise en main du campus par la préfecture... de
loin...
Très vite après l'entrée de tous les étudiants et personnels, la police
a chargé les étudiants assis... Pendant le déroulement des examens
donc... Pourquoi au fait ? A la demande de qui ?
Ils visaient plus particulièrement quelques étudiants, donc désignés par
l'administration pour être arrêtés sur le campus (un étudiant ayant été
arrêté à un autre endroit du campus en se rendant aux toilettes).
Désignés par qui, pourquoi, la seule réponse obtenue par celui qui
commandait les examens et la charge fut "tu dégages"... l'art rhétorique
préfectoral...
Arrestations sur le campus donc, avec la violence nécessaire adorée par
les membres des forces de l'ordre, avec leur visible plaisir d'insulter
et de penser humilier des jeunes (coups, mises au sol, tirages par les
cheveux, insultes... le quotidien pour ce travail... en sécurité
professionnelle)... qui entraîne d'autres interpellations, pour
rébellion, des étudiants ayant essayé d'éviter arbres et arceaux à vélo
dans la poussée....
Il est clair que l'université, par ce fait, jouait une politique de la
tension, les étudiants étant identifiés, il était aisé de les convoquer
ultérieurement...
Les très peu de personnels présents ont été expulsés de l'université
dans le même temps. Les policiers ayant ensuite pour consigne
d'évidemment laisser passer les personnels semblant surpris de la
présence de personnels non obéissants. Les opposants à la loi 'ORE'
sont, c'est connu, des extérieurs à l'université...
Pour finir sur la suite de ces interpellations, une personne a été
libérée dans la soirée, quatre étaient encore incarcérés ce matin.
Pendant notre présence en soutien et en demande de libération hier soir,
nous avons pu voir une partie de l'administration défiler au
commissariat, parfois conduit par les vigiles... Probablement pour
demander la libération des étudiants....
Et la violence légitime suit son cours...
Je me suis permis d'écrire trop vite cette trop longue description des
faits pour raconter les faits aux gens intéressés et ne pas laisser trop
de place aux fantasmes véhiculés par l'équipe présidentielle.
Bilan des violences : deux plaques de bois et deux serrures contre cinq
étudiants arrêtés, désignés par l'administration, plusieurs frappés, la
fin de la franchise universitaire, et la préfecture qui commande aux
étudiants et personnels. Et absolument pas pour permettre des examens
qui se tenaient.
Au niveau symbolique, un local associatif vidé, des locaux syndicaux
barricadés (le tableau syndical des personnels a anecdotiquement aussi
été nettoyé, le caractère patronal s'apprend vite, chez les
fonctionnaires...).
Tout cela sans que l'on sache qui prend les décisions (le président
n'étant présent que dans les boites mails et probablement dans les
média) ni, surtout, pourquoi elles sont prises...
Faut-il à se point complaire au gouvernement, et à sa volonté farouche
de faire passer cette loi purement 'technique' que l'équipe
présidentielle est prête à mettre le feu à notre université ?
Après l'autorité, il va falloir réinventer le travailler ensemble, il
serait sain que tout cela s'arrête et que, pour commencer, l'université
se retire des poursuites contre les étudiants.
Bonne fins de...
Yann Boniface.